22 avril 2024

Tuerie de Québec: cette impression de rejouer dans un vieux film

Jonathan Filteau était bouleversé au lendemain de cette tuerie du 31 octobre, à Québec. L’ex-sergent du Service de police de la Ville de Québec (SPVQ),  mari de Virginie Gendron native de Berthier-sur-Mer, a été le premier intervenant sur les lieux lors de l’attaque à la grande mosquée de Québec, le 29 janvier 2017. Ce soir-là, un homme armé a ouvert le feu sur les fidèles en pleine prière islamique, laissant derrière lui six morts et huit blessés.

Cette fusillade se veut d’ailleurs le plus important attentat politico-religieux qu’a connu le Québec à ce jour. “J’ai l’impression de rejouer dans un vieux film” déclare M. Filteau, reprenant les mots prononcés par Régis Labeaume en conférence de presse. “Dans un événement médiatisé à la grandeur de la planète, quand tu es un acteur de première ligne (...) c’est un évènement qui vient te chercher à tout moment...”

Similitudes événementielles

Les circonstances des deux dernières tueries de masse à Québec laissent présumer des éléments circonstanciels similaires qui donnent froid dans le dos. D’abord, ces évènements tragiques étaient prémédités, c’est-à-dire que les individus avaient planifié leur crime à l’avance. Ensuite, semble-t-il que les deux meurtriers avaient préalablement tenu des propos haineux pouvant laisser présager de possibles actes criminels. Enfin, les individus tous deux dans la vingtaine et qui ont tenté de faire le plus de victimes possibles, semblaient instables et visiblement atteints de maladie mentale. En d’autres mots, ces évènements meurtriers auraient possiblement pu être évités... “Qu’est-ce qui est vraiment arrivé le 31 octobre dernier, ça va prendre des semaines et des mois avant de savoir les réelles motivations de l’individu.“

M. Filteau et sa conjointe Virginie Gendron s’expliquent encore très mal qu’une telle tragédie puisse soudainement se produire à Québec, ayant tous deux patrouillé ses rues durant une vingtaine d’années. “ C’est une ville réputée pour être paisible, tranquille et sécuritaire.” se désole Mme Gendron.

Aux premières loges

Jonathan Filteau a été le tout premier à constater l’horrible scène. Ses yeux ont croisé ceux d’humains sévèrement traumatisés et paniqués, dont plusieurs enfants. Seul et de sang froid, il a commandé l’intervention de nombreuses équipes policières, déployé le périmètre de sécurité et maîtrisé avec vigilance l’état d’une quarantaine de survivants extrêmement émotifs. “Je me demandais si certains ne tenteraient pas de fuir, je craignais aussi qu’un second tireur soit parmi eux.” Avec force et courage, il a fouillé le bâtiment detoute urgence, ignorant complètement ce qui pouvait se cacher derrière les portes qu’il défonçait. Sa seule obsession: neutraliser le ou les tireurs... au risque d’y laisser sa propre vie.

Grandir dans l’épreuve

“Il y a ma vie avant le 29 janvier 2017, et il y a celle après.” M. Filteau soutient que c’est avec l’aide de son épouse Virginie et de sa fille Melody qu’il est doucement parvenu à maîtriser le ressac des chocs subis. “Suite à mon état d’hypervigilance, il m’arrivait de ne plus me rappeler par exemple du prénom de personnes que je côtoyais au quotidien, ou encore de conduire ma voiture sans savoir où j’allais. Ces effets ont été de courte durée et j’ai appris à les prendre avec un soupçon d’humour.” Cet évènement marquant aura clairement changé la vie de Jonathan Filteau, qui a décidé de n’en garder que les parcelles positives: “Ce n’est pas parce que notre vie est changée qu’elle ne peut pas l’être de façon positive. J’ai appris à construire autour de ça, ce qui m’a rendu encore plus efficace au niveau professionnel!” souligne-t-il.

Maintenant retraité des Forces de l’ordre, Jonathan Filteau est profondément convaincu que cette intervention policière lui était destinée . Son introspection aura mené l’ex-sergent du SPVQ à réellement comprendre les raisons de son insatiable soif d’aventure et de son constant désir de confronter le danger pour faire respecter l’ordre. Ce mode de vie l’aura mené à une carrière remarquablement atypique des Forces de l’ordre qui, après la tragédie de 2017, a pris tout son sens...

Voyez l’entrevue que nous ont accordée Virginie Gendron et Jonathan Filteau sur notre site web: journaloieblanche.com