01 mai 2024

Affaire Julie Anctil (premier texte de deux)

Julie Anctil, 47 ans, de Saint-Jean-Port-Joli, a plaidé coupable aux chefs d’accusation qui pesaient contre elle, à savoir trafic de stupéfiants et possession en vue d’en faire le trafic, le 30 septembre au Palais de justice de Montmagny. La drogue vendue par Julie Anctil aurait mené à la mort d’Anthony Miville et de Marc-Olivier Paquet, deux hommes dans la vingtaine originaire de Saint-Jean-Port-Joli, respectivement en septembre et en octobre 2019. L’Oie Blanche a suivi l’entièreté des délibérations, du 30 septembre au 2 octobre, et en dépeint une synthèse forte en émotions. Julie Anctil, qui reste détenue pendant les procédures, s’est présentée au Palais de justice dans le but de subir son enquête préliminaire. Cependant, elle a rapidement plaidé coupable et les tractations se sont fixées à l’étape judiciaire de la preuve sur la sentence. Le cœur du litige s’est élaboré autour de la relation de cause à effet entre la consommation des stupéfiants vendus par Anctil et le décès des deux hommes. S’il s’avère que la drogue vendue par Anctil a causé la mort des deux Port-joliens, cela constituerait un facteur aggravant, lui valant dès lors une sanction potentielle de plusieurs années de prison. Pendant trois jours, le procureur de la Couronne, Me François Doyon, a produit des témoins experts : toxicologue, médecin spécialiste et pathologiste judiciaire; des témoins protagonistes de l’affaire : Jean-Philippe Caron, l’unique survivant de cette saga, Brandon Plourde, l’entremetteur dans la vente du stupéfiant, ainsi que Julie Anctil. Et finalement, les familles des victimes. Les faits Le 13 septembre 2019 marque le 26e anniversaire de naissance d’Anthony Miville, l’ami d’enfance de Jean-Philippe Caron et Marc-Olivier Paquet : un trio tissé serré depuis l’école primaire. Au courant de la journée, les trois acolytes décident d’aller passer la veillée au Festi-bière de Rivière-du-Loup. Vers 19 h, Jean-Philippe et Anthony rencontrent Brandon Plourde dans le stationnement du Pétro-Canada à Saint-Jean-Port-Joli. Plourde leur vend trois grammes et demi de pure MDA (méthylène de dioxyde d’amphétamine), qu’il s’est préalablement procurés chez Julie Anctil. Le trio d’amis croyait erronément qu’il achetait de la MDMA, une substance s’apparentant à l’ecstasy. Peu après, Marc-Olivier Paquet rejoint Jean-Philippe Caron et Anthony Miville au Pétro-Canada. Ils prennent la route de Rivière-du-Loup. Une soirée cauchemardesque Les trois hommes prennent possession d’une chambre au motel Cartier, laquelle avait été réservée plus tôt la même journée. Ils se débouchent une bière et divisent la drogue en trois parts égales. Anthony Miville et Marc-Olivier Paquet prennent l’entièreté de leur part, alors que Jean-Philippe Caron la subdivise et n’en prend que les deux tiers. Peu après 21 h, le trio se rend en taxi sur le site du Festi-bière. Dans son témoignage, Jean-Philippe Caron affirme que tout s’est passé trop vite. Le trio n’a pas eu le temps de consommer une seule bière sur le site, que déjà deux d'entre eux régurgitent. Ceux-ci se retirent en marge du festival. Ils ressentent des symptômes alarmants : perte d’équilibre, confusion, perte de mémoire, incapacité à entretenir une discussion, désorientation. Des passants les aperçoivent mal en point et s’offrent pour les raccompagner à leur chambre de motel. À la chambre, les gars s’ouvrent une bière et Marc-Olivier Paquet et Anthony Miville fument une cigarette. Ils veulent « débuzzer ». Cela constitue le dernier souvenir de la soirée de Jean-Philippe Caron, l’unique survivant de cette saga. À son réveil, au petit matin, Jean-Philippe entend Marc-Olivier souffrant, gémissant à l’agonie. Au pied de son lit, gît Anthony Miville, inanimé. Du sang lui sort de la bouche. Il appelle les urgences. Le décès d’Anthony Miville sera constaté le matin même, alors que Marc-Olivier Paquet trépassera d’une défaillance de tous ses organes, un mois et demi plus tard, au Centre hospitalier de l’Université de Montréal (CHUM).