Alors que, son établissement historique de Montmagny, La Maison Rousseau, est présentement aux prises avec des difficultés financières, la maitresse des lieux et aubergiste Cynthia Bourgault, accompagnée de son équipe de passionnés, refuse de rendre les armes. Elle souhaite que la communauté de la Côte-du-Sud s’unisse afin de mettre en valeur les atouts régionaux et que leur grandeur trouve écho bien au-delà de notre territoire.
À l’arrivée du Journal dans la salle à manger principale de l’établissement, alors que le service du midi tirait à sa fin, l’atmosphère est joviale à l’intérieur de la bâtisse construite en 1852. L’accueil est souriant. Cynthia Bourgault, sobrement vêtue, s’approche et s’assoit à une table. Avec une voix remplie de passion et d’enthousiasme, elle s’ouvre sur sa réalité de restauratrice.
« Nous avons le couteau sur la gorge. Nous nous battons chaque jour pour survivre, car nous tenons à la vitalité économique de Montmagny et à notre patrimoine. Néanmoins, nous ne savons pas si nous serons encore en affaires d’ici un mois, ou d’ici la fin de la saison. Parfois, la lumière est loin au bout d’un long tunnel sombre. Nous n’avons pas choisi la voie facile, mais celle qui nous passionne », confie Mme Bourgault.
Il faut dire que l’exploitation de La Maison Rousseau est une prouesse digne des meilleurs funambules du Cirque du Soleil. D’un côté, l’équipe souhaite offrir des produits locaux de qualité à sa clientèle. De l’autre, elle doit respecter un prix de vente acceptable pour celle-ci. « Nous sentons beaucoup l’impact de l’inflation dans notre gestion. D’un côté, tous les coûts ont augmenté, tels que les fournitures, les aliments et la main-d’œuvre. D’un autre, les gens ont un budget plus serré, » explique-t-elle.
Également, son entreprise est désavantagée par sa situation géographique, car les coûts de livraisons sont plus élevés en région qu’en ville, et qu’elle ne peut pas autant augmenter ses prix.
Refuser de rendre les armes
« Bien souvent, lorsqu’une entreprise est en difficulté financière, les gens pensent qu’elle est déjà fermée et que c’est un échec. Mais c’est faux! Avec mon équipe, nous refusons de baisser les bras. Nous sommes toujours aussi passionnés par notre métier, et nous continuons de donner le meilleur de nous-mêmes. Aujourd’hui, nous lançons un appel à la communauté. C’est grâce à elle, qui vient apprécier nos plats, que nous réussirons à surmonter notre situation actuelle plus difficile » déclare celle qui est toujours convaincue que son entreprise peut devenir rentable et être pérenne.
Une auberge au cœur de la communauté magnymontoise
Cynthia Bourgault ne se voit pas comme restauratrice, mais bien comme aubergiste, au sens le plus noble du terme. « Une auberge, c’est le lieu de rassemblement d’une communauté. Les gens peuvent la fréquenter à toute heure du jour et du soir pour manger, boire, se loger, s’y divertir, mais également pour s’y rassembler pour sociabiliser. C’est ma vision pour La Maison Rousseau », explique-t-elle. Bien qu’une partie de sa clientèle soit de passage, elle rappelle que les portes de son établissement sont grandes ouvertes pour les gens de la Côte-du-Sud.
De surcroît, sa cuisine est un carrefour pour plusieurs producteurs de la région, qu’elle met en valeur à travers ses plats. Par exemple, le bison, l’agneau, le miel, la pintade, plusieurs légumes et plusieurs boissons qu’elle sert ont été produits localement par des gens d’ici tout aussi passionnés qu’elle. « Pour moi, c’est l’approche de l’avenir. Bien que ces aliments coûtent plus cher, ils sont de qualité nettement supérieure », déclare Mme Bourgault. De plus, elle est fière de leur offrir une vitrine et de les faire connaître au public.
Également, elle ne voit pas les autres acteurs économiques et touristiques de Montmagny comme étant des compétiteurs, mais bien comme étant des éléments essentiels d’un même écosystème dont elle fait partie. « Tous ensemble, je crois que notre but devrait être que les touristes restent plus longtemps dans notre ville, que nos concitoyens choisissent de sortir ici plutôt qu’en ville. Je crois que nous atteindrons cet objectif en offrant des produits de qualité diversifiés. Pour moi, nous avons tous notre place, et nous sommes tous nécessaires afin d’assurer la vitalité économique de notre région », énonce-t-elle.
La Maison Rousseau tatouée sur le cœur
La parcours de vie de Cynthia Bourgault a croisé la grande histoire de La Maison Rousseau en 2012. Née dans une famille de cuisinières, elle a complété un DEP en cuisine et un DEP en service de restaurant au Centre de formation professionnelle de Montmagny. Après avoir complété ses stages, elle a joint l’équipe de son futur établissement. « Tout a alors changé en moi. J’ai ressenti un gros coup de cœur, une passion qui m’habite encore, mais aussi un sentiment d’appartenance inexplicable. L’âme ancestrale des lieux s’est imprégnée en moi, et j’y ai vu mon avenir. J’ai le profond désir de garder ce bâtiment historique en vie, afin que tous en profitent et afin qu’il soit une fierté pour Montmagny », conclut Cynthia Bourgault.
Une famille pas comme les autres
« La gang de la Maison Rousseau, nous sommes tous habités d’une belle folie. Nous aimons la cuisine, nos produits, nos clients et notre communauté », affirme en souriant Cynthia Rousseau. Pour celle-ci, chaque membre joue un rôle essentiel au sein de l’entreprise, et elle n’hésite pas à souligner leurs efforts et leur créativité auprès de tous. D’abondant, ils apportent leur couleur et leur sensibilité artistique dans les activités de l’établissement, où la collégialité règne. Par contre, elle se désole que certaines personnes n’aillent pas au-delà de l’apparence moins traditionnelle de certains membres de sa brigade, afin de découvrir les personnes merveilleusement talentueuses qu’elles sont. Aussi, elle s’inquiète du manque de relève dans la profession, qui est trop souvent dénigrée. Mme Bourgault rappelle que le monde de la restauration offre plusieurs possibilités de carrière rémunératrice, passionnante et créative.