29 octobre 2024

L’agriculture contemporaine un exercice d’équilibriste

Les enjeux ont bien changé depuis l’époque des petites fermes destinées uniquement aux besoins de la famille. Regard sur le quotidien de producteurs laitiers, un pied sur la terre et l’autre dans le cahier de charges. La Ferme ancestrale Landry de Cap-Saint-Ignace a été construite en 1771. Il serait aussi intéressant qu’irréalisable d’entendre chacun des propriétaires qui s’y sont succédé commenter l’évolution du bien familial. Laissons plutôt parler le représentant de la 8e génération, Jérôme Landry, qui tient le cap avec sa conjointe, Émilie Fortin. Le couple gère un cheptel de 90 têtes, des vaches laitières Holstein, de même qu’une érablière de 3 000 entailles. Ils ont trois enfants âgés respectivement de 17, 15 et 13 ans. Comme ils n’emploient qu’une main-d’œuvre occasionnelle - difficile à trouver - et paient à l’occasion pour différents travaux à forfait, inutile de dire qu’Émilie et Jérôme veillent au grain 7 jours sur 7. En vertu des lignes directrices et normes élevées du MAPAQ (ministère de l’Agriculture, des Pêcheries et de l’Alimentation) et de l’accréditation LCQ (Lait Canadien de Qualité), nos producteurs doivent composer avec un imposant cahier de charges. Non qu’ils rechignent à se plier aux règles, étant tous deux consciencieux de nature en matière de bien-être animal et de qualité du produit. Seulement… Laver plus blanc que blanc

Entre ce qu’exigent Monsieur-et-MadameTout-le-Monde et le prix que ces derniers sont prêts à payer, il y a un monde :
- Non aux engrais chimiques! clament les gens haut et fort. Très bien, Émilie et Jérôme sont d’accord, mais apprécieraient qu’en même temps les gens arrêtent de leur dire que leur fumier naturel les incommode. C’est la nature et parfois, ça pue! - Le bio, le bœuf à l’herbe, le bien-être animal, sa liberté… ils veulent bien. Mais tout a un coût. S’ils sont prêts à investir dans la technologie et l’équipement requis pour satisfaire à tous les critères, le consommateur doit comprendre qu’il paiera quelques sous de plus pour son litre de lait. Tout est encore, ici, une question d’équilibre. Ce qui amène Émilie à parler d’une valorisation des efforts manquant cruellement à l’appel. « On ne montre que les côtés négatifs; il n’y a pas de retour sur ce que l’on fait. » Ce qui n’est pas pour attirer une future relève, autre problème auquel le couple devra éventuellement faire face. Désinformation vs Éducation Bien sûr, Monsieur-et-Madame-Tout-leMonde ne peuvent connaître l’étendue desdits efforts, l’envers du décor, l’engagement des producteurs. Jérôme ose, du bout des lèvres, parler de méconnaissance. L’UPA a déjà organisé des portes ouvertes dans les fermes, ce qui permettait aux gens de poser leurs questions, d’en apprendre davantage sur le métier de ceux qui permettent qu’il y ait du lait sur leur table. Malheureusement, la chose est aujourd’hui plus compliquée en raison des normes en matière de salubrité. Donc où? quand? comment? à qui expliquer les choses? Mais dans les écoles! s’exclame Jérôme. Rien de plus vrai. Se porterait-il volontaire? Encore faudrait-il que son emploi du temps le lui permette. L’agriculteur est bien comédien, pourrait-il aussi devenir éducateur? Une autre corde à son arc, quoi. Engagements dans la communauté Émilie a siégé au CA de la coop IGA pendant près de dix ans, au CA des Agricultrices de la Chaudière-Appalaches Est durant 15 ans et à l’UPA local pendant deux ans. Jérôme a quant à lui fait partie de plusieurs conseils d’administration par le passé, les principaux étant la coop agricole Avantis durant 20 ans. Il siège présentement au CCU (Comité Consultatif en Urbanisme) de Cap-Saint-Ignace et est impliqué au sein du théâtre des Deux Masques et de la ligue d’impro locale. Il fait aussi, à l’occasion, de l’animation de soirée pour des événements.