22 janvier 2025

Des perspectives démographiques peu encourageantes

Malgré une augmentation prévue de la population québécoise, plusieurs municipalités sur le territoire des MRC de Montmagny et L’Islet pourraient toutefois continuer de connaître une baisse démographique dans les prochaines années selon les dernières projections de l’Institut de la statistique du Québec. Alors qu’une population en déclin et vieillissante peut entraîner plusieurs conséquences sur sa communauté, est-ce possible d’inverser la tendance?

Vers la fin de l’année 2024, l’Institut de la statistique du Québec a publié l’édition 2024 des perspectives démographiques des municipalités du Québec. Dans ce rapport, il est possible de voir les projections de population pour chaque municipalité du Québec jusqu’en 2041. Frédéric Fleury-Payeur, démographe émérite et coordonnateur du programme des perspectives démographiques et de l’analyse, explique que l’étude est publiée aux cinq ans actuellement et qu’elle établit ses projections en fonction d’un grand nombre de paramètres afin d’avoir un portrait le plus précis possible. Les données sont toutefois établies en fonction des tendances actuelles. Un changement soudain dans le comportement de la population n’y serait donc pas reflété.

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Pertes importantes

Plusieurs municipalités sur le territoire pourraient perdre plusieurs citoyens d’ici 2041 selon les dernières projections démographiques disponibles.

Pour Montmagny, alors que la population atteignait près de 11 000 citoyens en 2025, elle pourrait descendre jusqu’à environ 10 500 dans les prochaines années. Sainte-Apolline-de-Patton pourrait aussi perdre un peu moins d’une centaine de citoyens, soit près de 15 % de sa population.

Du côté de la MRC de L’Islet, la plupart des municipalités sont en baisse. Cette dernière semble toutefois plus prononcée pour Saint-Pamphile avec une perte prévue de plus de 300 citoyens soit près de 15% de sa population et Saint-Omer où une soixantaine de citoyens en moins représente également une baisse d’environ 15 %.

Quelques municipalités qui se démarquent

Le portrait n’est pas négatif pour toutes les municipalités du territoire alors que certaines pourraient connaitre une bonne augmentation de population dans les prochaines années.

Berthier-sur-Mer est l’endroit où le taux d’augmentation est le plus haut avec près de 30 % d’augmentation, ce qui représente près de 500 nouveaux citoyens d’ici 2041. Saint-François-de-la-Rivière-du-Sud accueillera aussi plus de 150 personnes, soit un bon d’environ 10%. Il est aussi possible de noter que l’âge moyen de cette municipalité qui sera alors de 42,4 ans se situera sous la moyenne projetée pour la province qui est de 43,7 ans. Cap-Saint-Ignace attendrait également une centaine de nouveaux citoyens, soit un bon d’environ 3 % par rapport à sa population actuelle.

Du côté de la MRC de L’Islet, il est possible de remarquer que Sainte-Louise pourrait accueillir une cinquantaine de personnes d’ici 2041, soit un bon d’environ 5 %. Elle est aussi la municipalité la plus jeune avec un âge moyen projeté de 45,5 ans. Saint-Aubert pourrait aussi voir l’arrivée d’une soixantaine de nouveaux résidents, soit une augmentation d’environ 4 %.

Une communauté qui ne peut pas se supporter

« Ce que l’on remarque souvent dans aux endroits où la population est en baisse depuis déjà plusieurs années, c’est que la communauté commence à avoir de la difficulté à se supporter elle-même », explique le démographe. M. Fleury-Payeur souligne qu’une population en déclin qui est également vieillissante apporte souvent un manque crucial de gens en l’âge de travailler, soit les 18 à 55 ans. Il explique qu’il n’y a plus assez de gens pour s’occuper des aînés qui représentent une bonne partie de la population, mais qu’il en manque aussi pour s’occuper des enfants et adolescents, car il n’y a pas suffisamment de personnel pour les CPE et les écoles par exemple.

Les décès surpassent les naissances

Dans 12 régions du Québec sur 17, dont celle de Chaudière-Appalaches, les décès dépasseraient désormais les naissances. Le nombre de régions dans cette situation tendrait à augmenter au fil du temps en raison d’une tendance à la hausse des décès dans un contexte de vieillissement de la population, mais aussi d’une tendance à la baisse des naissances. Les seules régions où les naissances surpassent encore les décès sont Montréal, l’Outaouais, Laval, la Montérégie et le Nord-du-Québec. La différence entre les deux serait toutefois minime même à ces endroits et contribuerait peu à l’accroissement de la population.

Immigration et résidences secondaires

Selon M. Fleury-Payeur, deux facteurs auraient eu une influence particulière dans les dernières années sur le portrait démographique du Québec. En effet, il remarque que les hausses importantes de population à certains endroits sont souvent expliquées par l’immigration temporaire ou par la transformation d’une résidence secondaire en résidence principale.

L’immigration temporaire aurait fait une différence dans plusieurs régions alors que les entreprises ont fait venir plusieurs travailleurs pour combler le manque de main-d’œuvre. L’immigration temporaire surpasse d’ailleurs maintenant l’immigration permanente dans toutes les régions du Québec. Par contre, Chaudière-Appalaches fait partie des seules régions où les gains ne sont pas en augmentation, mais plutôt stable. Le démographe ajoute toutefois qu’il s’attend à voir ce type d’immigration diminuer dans les prochaines années avec les nouvelles règles du gouvernement qui entreront en vigueur en 2025. Il précise que l’impact pourrait toutefois être moins grand en région que dans la métropole à cause que le besoin de main-d’œuvre étrangère y est toujours important.

Bien que le mouvement vers les plus petites municipalités qui offrent plus d’espace amené par la pandémie s’est calmé, la transformation de résidence secondaire en résidence permanente se serait poursuivie dans les dernières années. Les endroits populaires pour les chalets et la villégiature ont donc pu voir leur population augmentée alors que plusieurs ont décidé de s’y installer de façon permanente et de vendre leur résidence dans un centre urbain.

Projection et non prédiction

M. Fleury-Payeur rappelle que, comme inscrit dans les notes méthodologiques de l’étude, les projections ne sont pas des prédictions. Comme elles reflètent les tendances actuelles, il est possible qu’une région parvienne à inverser la tendance. « Tout est possible! Plusieurs régions, surtout dans la dernière édition, on fait mentir les projections. On prend la peine de souligner dans l’étude que nous ne serons pas frustrés si les municipalités inversent les tendances, même qu’on les invite à le faire! [...] L’outil permet davantage de voir, si le nombre de naissances ou l’immigration restent les mêmes par exemple, vers où on s’en va. » Le démographe ajoute que des facteurs comme l’implantation d’une nouvelle usine, de nouveaux développements immobiliers ou de projets attirants peuvent être des éléments qui pourraient contribuer à changer la tendance.

Pour le moment, le démographe remarque que les MRC de Montmagny et L’Islet semblent se montrer fidèles aux projections depuis plusieurs années. En analysant les données publiées depuis 1996, il souligne que les deux régions seraient toujours très près de la population projetée à chaque nouvelle édition publiée du rapport.