28 octobre 2024

L’emprisonnement à la maison pour un viol

Un jeune homme reconnu coupable d’agression sexuelle pourra purger sa peine dans la collectivité. En effet, malgré la gravité du crime, le juge a retenu de nombreux facteurs atténuants pour justifier la sentence imposée.

« Les abus de substances intoxicantes licites et/ou illicites peuvent entraîner des conséquences. La présente affaire le démontre bien. Un individu peut même commettre une grave infraction criminelle », écrit le juge Sébastien Proulx, de la Cour du Québec, chambre criminelle et pénale, dans son jugement récemment rendu au Palais de justice de Montmagny. Afin de protéger l’identité de la victime, le Journal taira le nom de l’accusé.

Le criminel et la victime dans ce dossier sont âgés dans la vingtaine. Ils se rencontrent à l’été 2021 sur les réseaux sociaux et se fréquentent à quelques reprises, sans former un couple. Leur amitié se développe au cours de plusieurs partys durant lesquels de l’alcool et de la marijuana sont consommés.

Les événements sujets du présent dossier se déroulent en août 2021. Après l’un de ces événements, l’accusé, fortement intoxiqué, s’est rendu chez la dame. Il l’agresse alors sexuellement, en lui répétant « qu’elle ne pouvait pas lui résister ». Cette dernière a tenté à plusieurs reprises de le repousser, mais en vain. Au total, la relation non consentie a duré environ deux heures.

La victime porte plainte à la Sûreté du Québec dans les jours suivants. Le malfrat est ensuite arrêté et il rédige une déclaration incriminante. En décembre 2022, il reconnaît sa culpabilité aux gestes reprochés.

La détermination de la peine

Lors des représentations sur sentence, les parties ne s’entendent pas. L’avocat du poursuivant suggère une peine d’emprisonnement de deux années dans un pénitencier. De son côté, l’avocat de la défense propose une peine de dix-huit mois d’emprisonnement au sein de la collectivité (avec sursis).

Dans un rapport présententiel, un agent de probation, chargé d’évaluer le criminel, déclare : « Monsieur reconnait avoir agressé sexuellement la victime et bien qu’il ne mesure pas pleinement les impacts de son geste, il comprend qu’il aurait dû prendre les moyens de lui éviter ce préjudice et verbalise des remords sincères. Depuis la dénonciation [le délinquant] a entrepris plusieurs démarches en vue de résoudre ses problématiques personnelles, mais les efforts fournis n’ont pas nécessairement permis d’agir significativement sur ses facteurs de risque. Parmi ceux-ci, nous ciblons à l’avant-plan sa toxicomanie. En effet, la consommation du justiciable a joué un rôle précipitant lors du passage à l’acte, en plus de contribuer au maintien d’autres enjeux émotionnels et affectifs (blessures refoulées, deuil non résolu, faible estime de soi, évitement, fuite). »

De son côté, la victime vit toujours avec de nombreuses répercussions sur le plan émotif, physique et économique. Elle mentionne des symptômes de dépression. Aussi, depuis l’agression, celle-ci a été hospitalisée au moins huit fois en psychiatrie et fait quatre tentatives de suicide. Son réseau social s’est effondré et elle a connu des difficultés financières découlant de ses difficultés personnelles. Elle craint toujours pour sa sécurité.

À la lumière de l’ensemble de la preuve présentée, le juge Proulx conclut : « Après avoir considéré l’ensemble de la preuve, le Tribunal constate qu’il s’agit d’un acte grave, mais qui est aussi isolé. [...]Le délinquant, qui n’a aucune condamnation antérieure, est abstinent de l’alcool à la suite de son arrestation en 2021. Il s’est affranchi de ses dépendances par sa thérapie qui a été d’une durée de six mois. Les comportements criminels sont survenus dans un contexte de “désinhibition” et l’ensemble de la preuve ne révèle pas chez le délinquant la présence de traits de prédation, de déviance ou de distorsions cognitives relativement à la sexualité. L’homme a formulé des excuses et a exprimé des regrets sincères. »

Ainsi, l’accusé a été condamné à purger une peine d’emprisonnement de 22 mois dans la collectivité.