21 décembre 2024

Le repreneuriat, urgence de trouver une relève pour nos entreprises

Au Québec, environ 91 % des entreprises n’auraient pas de plan de relève formel. Alors que le processus de transfert d’entreprise peut prendre plusieurs années et que plusieurs entrepreneurs arrivent à l’âge de la retraite, l’enjeu du repreneuriat est devenu un sujet d’actualité. Lors du tournage de l’émission Personne n’en parle, plusieurs invités nous partagent leur expérience.

Le repreneuriat est le transfert d’une entreprise d’un propriétaire à une autre. Cela peut se faire à l’intérieur d’une famille, avec un employé ou un groupe d’employés, avec une personne externe ou encore avec une autre compagnie.

Selon Amélie Carrier, conseillère en transfert d’entreprise | Chaudière-Appalaches au Centre de transfert d’entreprise du Québec (CTEQ), il faut commencer à penser à sa relève le plus tôt possible pour assurer une meilleure chance d’avoir un transfert positif. Elle recommande toutefois de prévoir au moins une période de trois à cinq ans. « Il faut planifier ça longtemps d’avance, c’est très important. Il y a beaucoup de choses à mettre en place et c’est important d’avoir le temps de le faire et de contacter les bonnes personnes », ajoute Normand Gauvin qui a lui-même cédé deux entreprises dans les dernières années.

Quatre invités ont partagé leurs expériences et conseils lors d’un panel de discussion. Valérie Lebel a récemment repris trois boutiques situées au coeur du centre-ville de Montmagny. Elle représente la quatrième génération à la tête de l’entreprise familiale. Pour sa part, Frédéric Corriveau a vendu à une employée, Marie-Pier Leblanc-Picard, la division électrique de son entreprise Groupe Corriveau. Bien qu’il soit loin de l’âge de la retraite, il considère que de céder cette partie lui permettra de s’investir dans de nouveaux projets. L’homme d’affaires Normand Gauvin est maintenant à la retraite depuis quelques années après avoir cédé les deux entreprises qu’il possédait, dont Textiles Gauvin à Saint-Pamphile. Le transfert s’est fait avec Pascale Pelletier qui a gravi les échelons dans la compagnie avant de finalement avoir été ciblée comme relève potentielle.

Voici la réponse de nos invités à quelques-unes de nos questions:

Qu’est-ce que cela représentait pour vous de reprendre l’entreprise?

Valérie Lebel : « Une pression c’est sûr, mais surtout une fierté. C’est certain qu’il y a toujours un stress, je représente la quatrième génération qui reprend l’entreprise familiale. Par contre, je crois que tant que tu as la passion, il n’y aura jamais de problème trop grand à surmonter. »

Pascale Pelletier : « Pour moi, de reprendre une entreprise basée à Saint-Pamphile c’est une fierté. Dans le parc industriel, toutes les entreprises à part la mienne sont dans le secteur du bois. Garder cette entreprise-là vivante en région c’est une grande fierté pour moi. »

Quels conseils donneriez-vous à quelqu’un qui souhaite vendre ou reprendre une entreprise?

Normand Gauvin : « Avoir de la patience. Ça prend beaucoup de patience. Dans mon transfert pour Textiles Gauvin, ça a bien été, mais pour mon autre entreprise, ça a été beaucoup plus long. Les négociations ne vont pas toujours bien. Parfois, on avance d’un pas pour finalement reculer de deux, donc il ne faut pas se décourager. »

Pascale Pelletier : « De ne pas attendre de ne plus avoir la passion de son entreprise ou d’en être tannée. Par exemple, Normand avait encore la passion lorsque j’ai acquis Textiles Gauvin. Cela m’a permis de reprendre cela et d’avoir le goût de le faire. Il m’a transmis sa motivation. »

Frédéric Corriveau : « Il ne faut pas manquer l’opportunité de vendre. Quand l’entreprise est mature et qu’elle a un beau bilan, que tu sois rendu à ta retraite ou non, il ne faut pas manquer l’opportunité qu’offre un acheteur, car j’imagine qu’il y a beaucoup de vendeurs qui sont prêts à vendre, mais qui ne sont pas capables de conclure la transaction et que l’entreprise finit par fermer. [...] Ce ne sont pas des opportunités qui reviennent souvent dans le monde de l’entrepreneuriat. »

Valérie Lebel : « Il faut s’entourer des meilleures personnes et se montrer à l’écoute des conseils de notre mentor ou notre cédant pour emmagasiner le plus de connaissance possible pour l’avenir. »

Sur quels enjeux la région devrait travailler afin de garder nos entreprises vivantes?

Valérie Lebel : « Dans le commerce au détail présentement, il y a beaucoup de défis. On fait face à des concurrents beaucoup plus gros. Mais j’ai la profonde conviction que les commerces de détails avec pignon sur rue ont encore leur place. L’achat local peut faire la différence, autant pour garder nos employés ici et les services de proximité. »

Frédéric Corriveau : « Ce qui est le nerf de la guerre pour les régions, c’est d’attirer et retenir les jeunes travailleurs. Je pense que nous sommes sur la bonne voie avec de belles annonces comme celle du Complexe culturel et sportif. Pour que les entreprises puissent grandir, ça prend de la main-d’oeuvre qualifiée dans notre secteur.

Pascale Pelletier : « De mon côté, je crois que c’est important de retenir les jeunes. Toutefois, dans le domaine de la couture, je remarque que les gens avec les bonnes compétences se font rares. Même en formant des employés, c’est un défi énorme. Les travailleurs étrangers nous donnent un bon coup de pouce et à la fin de leur contrat, avec les nouvelles mesures gouvernementales, je vais en perdre plusieurs. Pour moi, il est là mon enjeu de relève. »

Normand Gauvin : « Pour les entreprises manufacturières, il y a un retard à rattraper au niveau technologique. Il ne faut pas avoir peur d’investir, parce que l’automatisation fait vraiment partie de l’avenir. »

Personne n’en parle est une collaboration entre L’Oie Blanche et le CAE Montmagny-L’Islet.